La création de l'église Saint Jean

L’église Saint Jean l’évangéliste du Soulié est un monument important de notre village. Nous vous proposons d’en relater la création et les légendes qui l’accompagnent.

L’église du Soulié fut bâtie en 1673 après maintes hésitations. Daniel Gros dans son ouvrage cité en référence (1) nous en donne les éléments les plus précis :

« De nouvelles circonscriptions paroissiales furent formées au dépend de celles trop étendues. C’est ainsi que la construction d’une église fût projetée à Vergougniac, domaine de terre d’Anglès et centre géographique de la nouvelle paroisse, tant par son site que par l’importance du hameau. La commande des travaux fût faite avec force détail, le 16 mars 1670, devant Maitre Delort, notaire, à Saint Pons. Cependant, il semblerait que les habitants du hameau de Caramantran (hameau aujourd’hui disparu et situé entre bernicot et Caudezaures - voir carte Cassini XVIIème siècle) ne l’entendirent pas de cette oreille et réclamèrent ladite église chez eux. A force de discorde et afin d’apaiser les esprits, il fût finalement décidé que l’église serait construite au lieu-dit Le Soulié-Haut, à égale distance des deux fiefs.”

 

Le récit de cette naissance est corroboré par Gabriel Rouanet, ancien maire du Soulié de 1945 à 1953.

Il nous raconte (2) : 

« É apuèi Sant Martin de Cosses se demoliguet, e alara bastiguèron una gleisa al Solièr. E aqui èran pas d’acòrdi, un voliá aqui, l’autre la voliá alá, apuèi la fagueron al mitan. » 

« E apueï Sant Martin dé Coussès se démouliguèt, é alaro bastiguéroun uno gleïso al Soulié. É aqui éron pas d’acordi, un boulio aqui, l’aoutré la boulio ala, apueï la faguéroun al mitan. »

« Après Saint Martin des Cousses tomba en ruines et ils bâtirent une église au Soulié. Et là ils n’étaient pas d’accord, l’un la voulait là, l’autre la voulait là-bas, après ils la firent au milieu »

 

Ce témoignage mérite d’être étudié plus en détail sur plusieurs points :

  • Tout d’abord, d’un point de vue linguistique, on peut remarquer que Gabriel Rouanet, comme tous ceux qui parlent occitan (patois) utilise le passé simple à l’oral pour raconter un évènement passé. En effet, en occitan, le passé simple est le temps de la narration par excellence. En français, son usage a quasi disparu du langage oral ; il reste utilisé à l’écrit formel.
  • Ensuite, l’ancien maire fait mention de « Saint Martin des Cousses ». Cette chapelle, aujourd’hui disparue, se situait entre Grandsagnes et la Croix del Bessou. Nous reviendrons ultérieurement sur cet édifice dont l’existence est attestée depuis le XIIIème siècle et qui mérite d’être sortie de l’oubli (notre association s’y emploiera lors de ses prochains travaux). A partir des travaux de Daniel Gros (essai historique sur la commune de Le Soulié – 1960), on peut souligner qu’il existait une autre chapelle Saint Martin de Bessières encore mentionnée en 1609.

 

Mais revenons à la création de l’église en 1673 et ce qu’en écrit Daniel Gros en 1960 : Après avoir hésité sur l’emplacement où devait être bâtie l’église et le chef-lieu de la nouvelle paroisse, le « Solher » fût désigné comme emplacement. La construction du sanctuaire, commencée en l’année 1673, fût achevée dans la même année ; d’un style roman grossièrement exécuté, aux vitraux de formes mi-ogivale, mi-romane. L’église fût mise sous le vocable de Saint Jean ; elle eut pour dimensions 21m 25 de long sur 8 m de large, tel que le prévoyait le contrat du bail. La clef de la porte d’entrée, comme son fronton, porte le millésime 1673 ; quant à la 3ème arche de la nef, la date est de 1692, ce qui signifierait, de prime abord, qu’elle aurait été bâtie en deux fois. Contrairement à cette idée, deux textes, de dates différentes, nous parlent, non d’agrandissement, mais d’une grande réparation : c’est au cours de l’année 1692 que la nef primitive en bois, fût remplacée par une voute en pierres.”

 

Pour terminer, comme notre petit pays est un territoire de légendes et de croyances, nous vous livrons la légende de “Las tres pèiras – Las très peïros, en fait le dolmen de la Gante sur la route de la Bastide.

Gabriel Rouanet nous la raconte :

« Aquel dolmen es la Santa Vièrja que lo pòrtet aqui. Al Solièr volián bastir la gleisa e alara la Santa Vièrja ie portava aquelas tres pèiras de Pèiramaus, la montanha que i a fàcia la Bastida. E los del Solièr devián venir l’atendre, sabes ! Solament i aviá una aubèrga a la Mieloana. Alara s’arrestèron per beure, un arribava, tornavan beure e doblidèron la Santa Vièrja. E quand soguèt fatigada pausèt las tres pèiras e encara ie son. Portèt aquelas pèiras una sul cap e una jos cada braç. Mas deviá èsser granda, perque sabes, las pèiras son gròssas. »

« Aquel doulmen es la Santo Bierdzo que lou portet aqui. Al Soulié boulion basti la gleïso e alaro la Santo Bierdzo ié pourtabo aquelos tres peïros de Peïramaous, la mountagno qui i a facio la Bastido. E lous del Soulié débion beni l’atendré, sabes, Soulament i abio uno aoubergo a la Miélouano. Alaro s’arrestéroun per beouré, un arribaba, tournabo beouré e doublidéroun la Santo Bierdzo. E quand souguet fatigado paouset la tres peïros e encaro ie soun. Pourtet aquelos peïros uno sul cap e uno dzous cado braç. Mas debio essé grando perqué sabes, las peïros soun grossos.»

« Ce dolmen c’est la Saint Vierge qui le porta là. Au Soulié ils voulaient batir l’église et alors la Sainte Vierge leur portait ces trois pierres de Peyremaux, la montagne qui se trouve en face Labastide. Et les gens du Soulié devaient venir l’attendre, tu sais ! Seulement il y avait une auberge à la Miellouane. Alors ils s’y arrêtèrent pour boire, un autre arrivait et ils reburent et ainsi ils oublièrent la Sainte Vierge. Et quand elle fut fatiguée, elle posa les trois pierres, qui y sont toujours. Elle portait ces pierres, une sur la tête et une sous chaque bras. Mais elle devait être grande, car tu sais, ces pierres sont grosses. »

 

De cette belle légende, nous trouvons deux autres variantes ; l’une dans le livre de Charles Gros – Le plateau du Somail – 1923 et l’autre dans le livre de Mathilde Bellaud Dessalles – La forêt d’Anglès et le château d’Espine – 1926. Vous retrouvez les extraits de ces documents dans le dossier consacré à l’église du Soulié et la légende des tres peiras sur notre site internet.

 

(1) Essai historique sur la commune de Le Soulié -1960 - Daniel Gros - Collection “Mémoire de la montagne du Haut Languedoc héraultais”

(2) Legendari d’Occitània - Légendaire d’Occitanie - Daniel Loddo - CORDAE La Talvera

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